Le cerfeuil tubéreux, un légume qui s’arrache !

S’ils appartiennent bien à la même famille, les cerfeuils, dit « commun » pour l’un, et tubéreux pour l’autre, ne sont pourtant pas à mettre dans le même panier. Le premier se déguste par ses feuilles, le second par la racine.

Dans le règne végétal, comme dans celui des Hommes, les faux-amis sont encore plus sournois qu’en linguistique. Prenez le cerfeuil : si, dans la famille des « Apiacées », un néophyte demande le « frisé » (ou le « Commun »), peut-être préférera-il piocher dans le tas plutôt que de ramasser un « tubéreux ». Bien que ces deux légumes partagent une ascendance commune, la botanique les range dans deux tiroirs distincts : le chaerophyllum bulbosum, dont il est question ici, est cultivé pour sa racine, met de choix autant qu’inattendu dans les plats d’hiver… et divers (nous y reviendrons). Beaucoup plus répandu, le cerfeuil dit « commun » (anthriscus cerefolium de son petit nom scientifique) se démarque de son homonyme par l’usage strictement condimentaire qu’en font les cuisiniers : seules ses feuilles, dont l’aspect général rappelle volontiers celui du persil, se révèlent comestibles et appartiennent au cercle aromatique des fines herbes qui parsèment salades et ragoûts.

Les gourmands en quête d’éléments solides propres à caler leur appétit devront, au contraire, bannir de leur rouleau de printemps toute la partie aérienne du cerfeuil tubéreux : ses feuilles plumeuses imprimées d’un vert sombre, qui contiennent un narcotique – la chérophylline (d’où provient son appellation latine mentionnée plus haut) – sont impropres à la consommation. Autant dire que s’y frotter l’œsophage revient, au mieux à s’offrir un billet gratis pour Alice au pays des Merveilles, au pire à engloutir un plateau de pissenlits par la racine.

L’intérêt purement culinaire du bulbosum réside dans sa formation souterraine : en creusant le sol, on tombe sur un chapelet de tubercules coniques et trapus de 5 à 10 centimètres d’envergure. Leur chair ferme prête commodément le flanc aux batteries de cuisine : une cuisson modérée révèle en elles une saveur sucrée et une texture fondante qui font écho à l’orosensation procurée par la pomme de terre, la châtaigne ou le topinambour. Consommé cru, râpé ou cuit, sauté à la poêle, réduit en purée aussi bien qu’en crème ou en potage, jeté au pot-au-feu ou servi en accompagnement, le cerfeuil tubéreux, riche en glucides et vitamines C, s’accointe avec la même aisance de toute forme de viande, bovine, porcine ou ovine.

bulbe de cerfeuil tubéreux, quel délice !
Le savoureux tubercule

Comment cultiver le cerfeuil tubéreux ?

Il faut compter 8 à 9 mois entre le semis et la récolte des premiers bulbes. Rappelons que le cerfeuil tubéreux est une plante potagère bisannuelle. Son cycle de croissance s’étend donc sur deux ans, période au cours de laquelle le végétal développe d’abord son système racinaire avant d’élancer une longue tige piquetée de petites fleurs blanchâtres regroupées en ombelles (voire la photo ci-dessous).

ombelle apiacée
fleur de cerfeuil, en ombelle

Le semis

Il est pratiqué, le plus souvent, en automne, entre septembre et novembre, voire en hiver (décembre et janvier) si des températures modérées dissipent le risque d’un gel trop dur. Comment procéder ? Dans l’idéal, un espace d’une trentaine de centimètres est à respecter entre chaque sillon. A l’intérieur de ces lignes parallèles, les graines sont disposées avec un intervalle de 2-3 centimètres. Recouvrir le tout avec une terre légère éventuellement enrichie de matières organiques et d’éléments nutritifs mais ne couvrez pas trop. Tassez bien la terre. Pendant la saison froide, le végétal entre en dormance, état de sommeil qu’il met à profit pour préparer sa germination au retour des beaux jours.
L’inconvénient d’un semis d’automne réside dans cette longue période de dormance durant laquelle de nombreuses autres graines d’autres plantes vont se réveiller, et cela bien avant celle du cerfeuil tubéreux. Difficile ensuite de retrouver vos jeunes pousses qui ressemblent à ça :

jeunes pousses de cerfeuil tubéreux

Pour y remédier, un semis au printemps est possible mais à condition de stratifier les graines dans un pot (opération qui consiste à ramollir leurs téguments – ou enveloppe externe – afin de lever la dormance et enclencher le processus d’éclosion). Cette technique n’est pas très compliquée, il faut apporter à la graine une période de froid soit en la mettant 1 mois dans le réfrigérateur, soit en la stratifiant avec du sable. Après plusieurs tests au Jardin d’Essai, cette dernière techique a notre préférence car elle confronte la graine au froid et à l’humidité qui sont deux conditions essentielles à sa bonne germination.
Pour la mettre en place, rien de plus simple : trouvez-vous un bocal en verre type confiture, du sable humide, mettez les graines et mélangez. Vous placerez ensuite ce bocal le long d’un mur au nord où vous allez l’oublier tout l’hiver. En mars, il vous suffira de faire un léger sillon, d’y épandre graines et sable et de bien tasser. Vous verrez vos graines lever bien plus vite et vous arriverez à les déterminer par rapport aux adventices.

L’entretien

Le cerfeuil tubéreux, assez peu exigeant, nécessite des gestes simples : arrosage en cas de sécheresse et désherbage classique. S’il advient qu’au printemps, soit 3 à 6 mois après le semis, la quantité de pluie est exceptionnellement déficitaire, la plante doit être alimentée en eau de façon régulière (sans excès toutefois car elle redoute l’humidité stagnante) . Gare aussi à la canicule : un bon paillage s’impose pour prémunir les racines contre de trop fortes températures.

La récolte

Il faut attendre l’été (de juin à août) pour procéder aux premières récoltes (à l’automne si le cerfeuil tubéreux a été semé au printemps). Visuellement, le jaunissement des feuilles et leur chute signalent qu’en sous-sol les racines ont atteint leur stade de maturité et sont bonnes à être arrachées.
Important : leur consommation ne se fait pas avant plusieurs semaines, voire des mois. Il est très fortement conseillé de les laisser maturer en cave ou en silo jusqu’au seuil de l’automne afin qu’elles gagnent en saveur.

Ce légume peu cultivé dans nos jardin mérite vraiment d’y retrouver une place , car son goût original est un mets de choix. Retrouvez le à la gamme chez La Bonne Graine , c’est le moment du semis, d’ailleurs Au Jardin d’Essai nous avons déjà mis les graines à stratifier !

3 commentaires Ajoutez le votre

  1. Carol dit :

    Bonjour,
    Qu’elles sont les légumes amies, s’il vous plaît?
    Carol
    PS : Meilleurs vœux 2019

    1. Bonjour Carol,
      Nous ne saurions vous répondre précisément, nous mélangeons tout dans le jardin, sans trop faire attention à ces critères.
      Si des lecteurs peuvent nous répondre d’après leur expérience, n’hésitez pas !

  2. Jocelyne Bachet dit :

    Bonjour à tous les jardiniers,
    effectivement, depuis que je jardine en permaculture, tous les légumes se ressèment, car je fais du compost de surface et je ne me préoccupe plus des bonnes associations. Par contre je fais attention à ne pas mettre les alliacées toujours au même endroit, je pratique la rotation des cultures. Je suis autonome en légumes, en fruit et en oeufs (je ne mange pas mes poules).
    Une permacultrice décroissante

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